Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
30 décembre 2011 5 30 /12 /décembre /2011 10:23

Publié dans le SHOFAR - DECEMBRE 2011

 

A la mi-juillet, nous avons été invités à la Bat Mitzvah dune petite nièce à Jérusalem. Se trouver pendant le Shabbath à Jérusalem est un réel privilège  pour  celui  qui  peut ressentir latmospre spirituelle et mystique qui y règne. Ma nièce me confirme qu’elle n’a jamais ressenti en Belgique ce qu’elle resent à Jérusalem, surtout pendant le Shabbath.

‘Shirat  Sara’, un centre de prières  pour femmes


La Bat Mitzvah a eu lieu au Centre Shirat Sara fondé en 1994 et qui a adopté ce nom  en 1996 suite à l’assassinat d’une membre active (Sara Duker), dans un attentat  à la bombe. ‘Shirat Sara’  sous-loue  une  salle  de prières  dans un institut d’études judaïques. Les femmes orthodoxes se retrouvent pour prier et lire dans la Torah régulièrement, toutes les six semaines environ. De ce fait, cet endroit ne se substitue en aucun cas à leur synagogue. Les hommes n’y sont pas admis, sauf lors d’une Bat Mitzvah, quand les membres ouvrent leurs portes aux familles pour venir écouter la Bat Mitzvah lire dans la Torah. 

 

Debby Sinclair, une des membres actives du groupe, précise : « Le Centre ‘Shirat Sara’ est probablement le premier groupe orthodoxe de ce genre, ouvert à toute femme qui souhaite étudier et prier entre femmes, quel que soit son niveau d’observance religieuse. Il existe des synagogues qui permettent aux femmes de lire dans la Torah à Rosh Chodesh ou à une Bat Mitzvah mais jamais pourun service complet de prières tel qu’à ‘Shirat Sara’.

 

Le fait de limiter la présence des hommes sexplique dune part par les restrictions halakhiques sur la voix des femmes ‘kol isha’ dont la source est dans le Talmud, Traîté Berakhot 24. Le nombre d’hommes est limité à neuf afin de ne pas entrer dans des considérations de mynian, le quorum de dix hommes ». 

 

« Notre groupe répond strictement aux règles de la  Halakhah,  qui  stipule  qu’un  mynian n’est constitué que d’hommes. C’est pourquoi toute prière régulière d’un office qui exige un mynian, tel le Kaddish, la répétition de Amidah  (la prière silencieuse), les bénédic- tions telles que « Barekhou » ou celles avant et après l’appel à la Torah ne sont pas dites », confirme Debby Sinclair. 

 

Shirat Sara est un groupe de femmes.  Les hommes n’y sont donc pas admis. Cependant, par bonté pour la fille qui fait sa Bat Mitzvah et pour son père, les hommes de la famille peuvent y assister. 

 

Il est évident  que les ultra orthodoxes de Jérusalem (Haredi) considèrent ce mouvement comme tout à fait ‘inacceptable’ car il s’oppose à leur conception du rôle de la femme

dans le Judaïsme. Dans les groupes plus éclai- rés, nombreux sont ceux qui considèrent que c’est ‘magnifique’. La ville sainte présente actuellement de nombreux développements intéressants dans ce sens. 

 

Dans le cadre de la publication dun livre, Sara Friedland Ben-Arza a envoyé  un question- naire à 50 rabbins pour obtenir leur opinion sur « Shirat Sara ». La réaction principale fut l’ignorance, 42 rabbins ont décidé de ne pas répondre. Sur les huit réponses, 4 furent pour et 4 contre leurs activités, sur base de règles de la Halakhah. Cependant plusieurs rabbins ont donné leur bénédiction sur la manière pru- dente et respectueuse avec laquelle l’office est organisé. 

 

Les « Banot Tzlofrat  » de la Parasha 

Pinhas

La Parashat Pinhas présente, entre autres, lhistoire des « Banot Tzlofrat ». Ces cinq filles demandent  que la terre de leur père décédé, leur soit donnée en héritage. Dans les socié- tés  patriarcales  de l’époque,  la  terre  était uniquement héritée par les fils. Elles étaient studieuses, sages et intelligentes et ont osé demander à Moïse que leurs biens leur soient transmis. Moïse va parler à l’Eternel et don- nera raison aux sœurs. « Je pense que les filles de Tzlofrat sont un bon exemple pour une fille de 12 ans, quand on prend sur soi, la responsa- bilité de nos actions », conclut la Bat Mitzvah.

 

Ce  jugement  div in  est  une  loi  explicite. L’Eternel déclare que la manière de traiter l’héritage d’un homme qui décèderait sans avoir de fils est de donner la terre à ses filles. Et de conclure : « telle sera la Loi pour les enfants d’Israël ainsi que l’a prescrit l’Eternel à Moïse ».

 

Les avis sont partagés

Notre expérience fut unique et perturbante, en ce sens que quand jai été appelée  à la Torah, jai ressenti une expérience spirituelle iné- dite. Jai aussi ressenti un malaise de voir les hommes de la famille installés derrière des


panneaux grillagés (mechitsa) et de les voir entrer et sortir en fonction du fait que si des femmes, non membres de la famille de la Bat Mitzvah, lisaient dans la Torah, les hommes devaient sortir. J’ai aussi pensé à une  sorte de « revanche » des femmes sur ce que les pratiques leur ont imposé à elles, derrière les rideaux ou les panneaux, pendant les offices orthodoxes traditionnels.

 

Notre nouveau rabbin Marc Neiger nest pas daccord avec « cette séparation qui ne peut mener qu'à l'oppression, car seule la suppres- sion de telles barrières peut permettre un respect mutuel.»

Jai aussi voulu demander lavis de notre cher rabbin Albert Dahan : « Ce qui est terrible, c’est que derrière le grillage, il ne peut y avoir que maximum neuf hommes, pour qu’il n’y ait pas mynian. On concède aux femmes le droit de prier mais comme il n’y a pas de mynian, c’est une manière de dire : votre prière n’est pas une prière. Elle ne compte pas. Rashi va plus loin, il a dit : par respect pour le public, on n’appelle pas les femmes à la Torah. Respect pour le public’ signifie que s’il se trouve dans l’assemblée des hommes, un ignorant qui ne sait pas lire, et qu’une femme vienne lire, il en éprouvera de la honte et il ne convient pas qu’une femme fasse honte  à un homme. C’est une ruse pour éloigner les femmes, pour ne pas leur accorder l’égalité religieuse devant l’Eternel. La Mishna précise : les hommes sont tenus de prier à temps fixes, par contre les femmes sont dispensées de tous les comman- dements positifs qui sont liés au temps ; car si, à lheure de la prière, un enfant pleure, la femme doit s’occuper de l’enfant et Dieu lui compte comme si elle avait prié. Rabbi Dahan nous rappelle que la Loi parle de ‘dispenses’, c’est-à-dire que si la femme veut, elle peut. Or le rabbinisme va transformer cette dispense en exclusion ».

 

Pour le rabbin Marc Neiger : « la dispense est un artifice politiquement correct pour mettre en place une exclusion déguisée: nous n'avons donc pas le droit de nous cacher derrière cette dispense et nous devons accepter une égalité au moins de potentialité ».

 

Les avis sont partagés, n’empêche que les femmes orthodoxes de ‘Shirat Sara’ ont trouvé un moyen de prier en paix dans les limites de leurs pratiques religieuses. Humblement, elles vont au-delà de l’interprétation de certains qui veulent exclure la femme de la lecture de la Torah.

 

Il semble que nulle part dans la Bible, voire le Talmud, il ne soit indiqué que la lecture de la Torah soit exclusivement réservée aux hommes, même si des limitations sont claire- ment évoquées pour les femmes sans que la mise en place de ces limitations ne soit claire. C’est le point de Rashi, qui par ailleurs, a ensei- gné la Torah à ses trois filles.


Plusieurs  femmes  sont décrites  dans  les sources  juives  comme  des  exemples  de savoir, de piété  et de leadership. C’est le cas des « Banot Tzlofrat », ces femmes érudites et sages qui ont dédié leurs vies à leur cause et ont cherché, de manière pacifique, à obtenir un lopin de terre en terre sainte d’Israël. En ce sens les filles de Tzlofrat sont un modèle pour avoir osé parler dans un monde patriarcal qui ne les invitait pas à le faire. Ce sont elles qui ont guidé les femmes de la famille lors de cette Bat Mitzvah à Jérusalem cet été.

 

Linterprétation des textes bibliques sur la connexion avec le Tout Puissant a fait couler beaucoup d’encre depuis le début des temps et ne s’arrêtera pas de sitôt.                                       

 

par Charlotte Gutman-Fischgrund


Partager cet article
Repost0

commentaires

Présentation

  • : Let's Freedom of speech win over brainwash. Vive la liberté d'expression ! Puisse-t-elle vaincre la manipulation des esprits.
  • : Contribute to reduce the immense gap between the reality of Israel/Israelis and the biased image out there. Contribuer à réduire le fossé énorme entre la réalité et l'image biaisée d'Israël et des Israéliens.
  • Contact

L'éthique professionnelle / Professional ethics

Je suis ravie de rejoindre le monde des blogueurs. Vous y trouverez non seulement mes articles parus en français et en anglais mais aussi des liens ou articles d'intérêt général. Journaliste de formation et attachée de presse au niveau européen, je suis soucieuse du respect de l'éthique de ces deux professions.

 

I am happy to join the world of bloggers. You will not only find my articles published in French and English but also links or articles of general interest. Journalist by education and European press attache, I am very concerned about the respect of ethical rules of those two professions.

 

Recherche